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Crédits : Pixnio/Creative Commons

Madagascar, la misère encerclée par les mers

Par Sarah Coudert

Les pays qui subissent le plus les conséquences du dérèglement climatique ne sont pas ceux qui en sont la cause principale. Madagascar est l’exemple d’un pays endigué par les ingérences climatiques des pays du Nord. L'île possède le triste palmarès d’être le premier pays à connaître la faim à cause du réchauffement climatique dès 2021 selon l’ONU.

En novembre dernier a eu lieu la COP27. Après de longues négociations et plus d’un jour de prolongation, le sommet s’est finalement soldé par une « bonne nouvelle ». Il y a eu un accord historique pour aider les pays les plus touchés par le réchauffement climatique. Dans les faits, c’est une aide financière pour tenir compte des dégâts passés et des dégâts que ces pays ne vont pas réussir à éviter dans le futur. C’est un fond dédié aux « pertes et dommages ». C’est une manière de réduire un peu l’énorme injustice climatique.

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L’État de Madagascar, situé au large de la côte Sud Est de l’Afrique est la quatrième plus grande île au monde et bénéficie d’un environnement naturel exceptionnel. Cependant, malgré ses ressources abondantes, il s’agit d’un des pays des plus démunis. Il est classé 157ème sur 186 au redoutable classement des pays les plus pauvres. D’après le rapport mondial sur le développement humain du PNUD datant de 2014, 72 des ménages malgaches vivent en dessous du seuil de pauvreté. Le taux de mortalité des enfants de moins de 5 ans est de 62%. L’insécurité alimentaire chronique touche toutes les régions du pays. 

Depuis longtemps, le changement climatique et les facteurs environnementaux ont un impact sur les flux migratoires mondiaux. Madagascar est un des pays les plus touché par le changement climatique et fait face de manière cyclique aux sécheresses et aux inondations ainsi qu’aux cyclones de forte intensité. 

Au cours de la dernière décennie, les changements sociaux et environnementaux ont conduit un grand nombre des habitants de Madagascar à migrer à l’intérieur du pays à la recherche de meilleures opportunités. 

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Les éléments climatiques se déchaînent

 

Le climat est déréglé. Le phénomène El Nino le plus puissant en 35 ans a aggravé la situation. El Nino résulte d’une anomalie chaude de température à la surface de la mer. Cela s’accompagne d’une interaction océan/atmosphère qui perturbe les courants marins. Cela provoque des précipitations intenses ou des périodes de sècheresse exceptionnelles. 

 

La sècheresse malgache a entrainé des récoltes pauvres, des pertes de bétail, ce qui a conduit à une situation d’urgence avec des besoins humanitaire qui persistant jusqu’à aujourd’hui. Cela fait trois ans qu’il n’a pas plu dans le district d’amboasary, à l’extrême sud. C’est une région sous-développée, où les gens ne vivent que de l’agriculture. De la sécheresse résulte le kéré. Le kéré qui signifie « manque de nourriture » est la famine Malgache. Selon l’ONU, plus d’1 million de personnes ne mangent pas à leur faim à Madagascar. 

Depuis 1896, l’île a connu 16 phénomènes de ce type. Depuis 4 ans, il s’agit de la pire sécheresse depuis 40 ans, et l’ONU parle de la « première famine liée au réchauffement climatique ». On voit sur cette photo, capturée par la journaliste Gail Borgia, des enfants qui mangent du cuire bouilli. Cela n’a aucune valeur nutritionnelle et est très indigeste. C’est juste le moyen de remplir son estomac et calmer la faim.

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Les cyclones emportent tout sur leur passage. Les cyclones et tempêtes tropicales qui ont frappé Madagascar en début d’année ont charrié des pluies plus intenses en raison du changement climatique. Ana, Batsirai et Amnati ont causé de graves inondations, affectant plus d’un million de personnes, détruisant infrastructures et cultures et faisant plus de 200 morts au total. 

L’humidité contenue dans l’atmosphère est exponentielle à cause du réchauffement climatique, ce qui intensifie les précipitations. 

 

Malgré la fin officielle du phénomène El-Nino en 2017, la population ne s’est pas rétablie et reste vulnérable. Les ressources en eau ne sont pas revenues à des niveaux normaux, les terres agricoles ont une faible productivité et la réduction de l’épargne des ménages ne permet pas de relancer les activités normales.

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L’espoir sans faim 

 

« Si on n’avait pas de criquet on serait tous morts » confie une malgache du sud à Arte. Une étude effectuée entre 2009 et 2018 par l’organisation internationale pour les migrations (OIM) dans le sud de Madagascar montre que de plus en plus de personnes quittent leurs foyers. La principale raison de ces déplacements est la sècheresse. On compte 42% de déplacés climatiques. On peut noter une hausse significative des déplacements depuis 2018, une situation qui s’explique par le manque de pluie durant la campagne 2017-2018.

Si nous observons les déplacements sur une carte, nous remarquons que les populations se déplacent vers le sud. Madagascar est découpée en districts. Le district en le plus touché est celui d’Amboasary situé au sud dans la région d’Anosy. Les régions d’Anosy, Androy et tout l’extrême Sud partent pour l’ouest de l’île. Le lieu de destination est autour du district de Mahajanga dans la région de Boeny. 60% des déplacés ont cette région pour objectif. 11% se retrouvent à Ilakaka à Ihorombe espérant faire fortune dans les mines de pierres précieuses. Mais la réalité est souvent cruelle. 22% des individus qui sont partis vers ces nouveaux territoires ne parviennent pas à améliorer leurs conditions de vies et reviennent chez eux. 

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Des déplacements forcés car à l’étranger rien ne bouge

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SOS médecins, Action contre la faim, médecins sans frontières, Amnesty internationale, des associations et des ONG se mobilisent pour assister la population malgache. À côté de ces combats, on constate une paralysie des gouvernements.
« Le peu de discours que l’on entend sur Madagascar ce n’est pas une remise en question sur les erreurs de la France et de la gestion internationale du climat mais un constat de la situation en s’en dédouanant. » confie Amandine Deroo.

La responsabilité des pays du Nord n’est pas mise en avant. Les articles sur le sujet demeurent rares car relèvent du tabou de la colonisation.

La population malgache est livrée à elle-même. C’est une situation d’autant plus emblématique que l’île ne contribue qu’à auteur de 0,01% des rejets mondiaux. La Grande Ile est la première victime du réchauffement climatique provoqué par d’autres. En clair, ceux qui polluent le moins sont ceux qui subissent le plus.

À Madagascar, aucune loi ne traite spécifiquement de la problématique de déplacements interne dans le contexte de catastrophes et du changement climatique.
Ni le cadre juridique national lié à l’environnement, ni la Politique Générale de l’État, ni la Politique nationale du Changement climatique n’aborde cet aspect de déplacement de populations lié aux catastrophes et changements climatiques.

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Crédits :Gail Borgia

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